Qui sont les Français adeptes du bio pas cher ?

Qui sont les Français adeptes du bio pas cher ?
Crédits : CentralITAlliance
Le « bio » n’en finit plus d’agiter les colonnes des observateurs et éditorialistes, preuve d’une certaine prégnance du sujet dans les débats publics sur l’alimentation. Sur la question sensible du prix, l’Observatoire E. Leclerc des Nouvelles Consommations apporte une lumière nouvelle sur la réalité de ces Français qui souhaitent ne pas dépenser plus lorsqu’ils achètent bio.
Les données et les enseignements présentés dans cet article se basent
sur l’analyse des résultats de l’enquête réalisée en 2017 auprès de 2 000 Français
par IPSOS pour l’Observatoire E.Leclerc des Nouvelles Consommations.

Le bio pour tous ?

« Le bio est-il toujours réservé aux bobos ? », se demandait, le magazine en ligne Slate.fr début 2017. Il abordait d’une manière quelque peu provocante, un sujet qui fait feu de tout bois dans le débat public français, celui du prix, supposément élevé, du « bio ». Slate illustrait l’idée que, finalement, le bio ne serait plus réservé à une élite économique. Le magazine se faisait alors l’écho de plusieurs enquêtes, reportages, études, conseils de magazines féminins ou témoignages (notamment avec l’article « Je vis écolo et ça ne me coûte pas plus cher », sur le site Reporterre), arguant en ce sens. Slate concluait alors que le bio serait bel et bien devenu accessible à tous.

De nombreuses initiatives essaimant le territoire français, pourraient conduire à la même conclusion. Des AMAP en milieu rural à ce magasin proposant du « bio démocratique » dans une rue populaire de Paris, tout pousse à croire que le bio est devenu de plus en plus accessible. Une étude du Crédoc affirmait déjà en 2011, qu’entre 1995 à 2010, la part d’acheteurs réguliers ou occasionnels de produits bio, (parmi les personnes vivants avec moins de 900 euros nets par mois), avait plus que doublée (de 20 à 52%).

Les Français consomment bio, mais peu se rendent dans les magasins spécialisés

La situation a-t-elle évolué depuis 2010 ? Les chiffres de l’Observatoire E. Leclerc des Nouvelles Consommations permettent de poser un premier constat : de plus en plus de Français se tournent effectivement vers le bio. 68% d’entre eux affirment « faire de plus en plus attention à l’engagement environnemental des marques » qu’ils achètent. Ces consommateurs témoignent alors plus particulièrement de leur attachement à l’agriculture biologique. De même, 61% des consommateurs français déclarent acheter régulièrement « au moins un produit bio », que ce soit pour l’alimentation ou bien pour l’hygiène-beauté.

Pour autant, peu de Français se rendent en magasin bio pour y faire leurs achats. En effet, seuls 7% d’entre eux y vont une fois par semaine, et 22% une fois par mois. Cette part s’élève à 49% pour la famille des Changeurs contre seulement 7% pour les Assiégés, (les Français ayant la contrainte budgétaire la plus forte). Les produits vendus en magasin bio seraient-ils trop chers pour ces français ?

Le bio : un marché à deux vitesses ?

47%
des Français préfèrent se tourner vers des produits non biologiques pour ne pas payer plus cher.

Les hommes semblent légèrement plus propices que les femmes à entrer dans cette catégorie (51 contre 44%), de même que les 45-59 ans plutôt que les 25-34 ans (51 contre 42%).Que penser de la question du prix ? Sur ce point, la France est coupée en deux. 53% des Français disent préférer acheter un aliment produit selon les règles de l’agriculture biologique, quitte à dépenser plus, contrairement aux 47% restants qui refusent de voir l’addition augmenter. En sait-on alors un peu plus sur celles et ceux qui sont adeptes d’un bio pas cher ?

Les chiffres de l’Observatoire permettent de dresser un portrait-robot du Français qui cherche à consommer du bio à moindre frais :

  • Les urbains recherchent aussi plus à acheter du bio à moindre coût, plutôt que les ruraux (50 contre 46%).
  • Les hommes semblent légèrement plus propices que les femmes à entrer dans cette catégorie (51 contre 44%), de même que les 45-59 ans plutôt que les 25-34 ans (51 contre 42%).
  • Ceux dont le foyer gagne moins de 2 000 euros plutôt que ceux dont le foyer gagne plus de 3 000 euros (50 contre 41%) ou encore les cadres supérieurs et libéraux plutôt que les ouvriers (54 contre 39%).

En effet, 68% des Prétendants ainsi que 76% des Assiégés refusent de dépenser plus pour leurs aliments bio, contre « seulement » 34% des Créactifs, 28% Mécènes et 17% Changeurs. Ces trois dernières familles représentent un peu plus de la moitié des Français. Elles sont constituées de personnes plus soucieuses de leur impact sur l’environnement, ce qui se manifeste par des achats plus engagés. Les Mécènes et les Changeurs optent pour des achats plus citoyens que la moyenne. Les Créactifs ont quant à eux une consommation plus identitaire, c’est-à-dire qu’ils entendent revendiquer davantage que les autres leur identité par les produits ou marques qu’ils achètent. 90% d’entre eux disent que ce qu’ils consomment reflète leur personnalité et leur style de vie.Toutefois, ces différences statistiques semblent trop peu marquées pour en tirer des conclusions. Cela montre qu’il est de plus en plus difficile de comprendre les choix de consommation des Français selon les critères traditionnels (âge, lieu d’habitation, revenu, CSP, etc.) En revanche, lorsqu’on observe les 5 familles de consommateurs de l’Observatoire, les différences sont plus marquées.

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Part de Français qui ne sont « pas d’accord » avec l’idée de « préférer dépenser plus et acheter un aliment bio ».

Les données de l’Observatoire dessinent en filigrane un marché du bio à deux vitesses, répondant à deux besoins différents. D’un côté, les consommateurs qui recherchent du bio pour le goût, la qualité des produits ainsi que pour des problématiques liées à la santé, tout en cherchant des produits à prix abordables. De l’autre, les consommateurs qui embrassent plus volontiers l’achat bio comme un achat engagé, militant, voire parfois, identitaire. Ces consommateurs sont alors plus soucieux d’acheter des produits qui portent leurs valeurs, quitte à les acheter un peu plus cher (choix de produits issus du commerce équitable, meilleure rémunération et valorisation des producteurs, circuits courts, etc).