Le doggy-bag… un désamour bien français ?
Le doggy… quoi ? En ouvrant plusieurs dictionnaires, le « doggy bag » ne semble pas encore être inscrit au vocabulaire des Français. Pourtant, le Larousse propose déjà une première définition : « sachet (ou boîte) que l’on propose aux clients dans les restaurants pour qu’ils emportent ce qu’ils n’ont pas consommé ». Si le doggy bag est régulièrement utilisé par les consommateurs Américains, nous sommes encore plus complexés sur le sujet en France. Comment expliquer cela ?
« C’est culturel », affirmait en 2014 Bernard Boutboul, directeur général du cabinet spécialisé Gira Conseil, dans un article du site Le Point : « En France, on ne repart pas d’un restaurant avec ses restes, il y a une certaine gêne à le faire ». Le terme anglo-saxon, est lui aussi relativement neuf : il proviendrait, dans son usage courant, des années 1970. A cette époque, les magazines se demandaient s’il était dans l’usage de demander des « doggy bags », y compris pour ceux qui n’avait pas de chien à la maison… (Le mot anglais dog étant en effet à l’origine de l’expression). Le doggy bag devra t-il se refaire un nom pour séduire les Français ?
Les Français s’engagent contre le gaspillage alimentaire !
La loi relative à la lutte contre le gaspillage alimentaire, votée le 11 février 2016 fait un premier pas dans ce sens. Elle incite les restaurateurs à proposer le doggy bag, sans pour autant le nommer ainsi. Elle impose surtout aux distributeurs alimentaires de ne pas rendre volontairement impropre à la consommation leurs invendus. La lutte contre le gaspillage alimentaire apparaît de plus en plus présente dans les mœurs françaises, que ce soit sur le plan culturel ou juridique.
Les résultats de l’Observatoire E. Leclerc des Nouvelles Consommations corroborent cette idée. Tout d’abord, les Français se montrent sensibles sur la question. Pour 45% d’entre eux, l’engagement pris par une marque du secteur alimentaire pour réduire le gaspillage est un élément important qui permet d’évaluer l’impact environnemental de cette marque. Ce chiffre apparaît comme particulièrement élevé, au regard d’autres critères qui apparaissent comme étant moins importants pour les Français. Par exemple seulement 14% d’entre eux jugent qu’il est important qu’une marque bénéficie de « points de vente plus écologique ». Au niveau individuel, 97% des Français affirment « faire de plus en plus sorte de ne pas gaspiller de la nourriture ». Cette proportion varie de 94% chez les Prétendants à 100% chez les Créactifs.
La chasse au gaspillage alimentaire fera-t-elle les beaux jours du doggy bag ?
Dans la pratique, de nombreux commerçants, restaurateurs et distributeurs mènent des actions pour lutter contre le gaspillage alimentaire. De nouvelles applications mobiles proposent de devenir des intermédiaires entre les invendus des commerçants ou des distributeurs et les consommateurs. C’est le cas de l’application Too Good to Go, qui a été téléchargée plus d’un million de fois via Androïd. Cette application couvre 34 villes sur un réseau de 1 600 commerçants. Zéro Gachis est aussi une belle initiative, qui rapproche les distributeurs appliquant des promotions sur des produits proches de leur date de promotion, des consommateurs. Cette association identifient les grandes surfaces engagées contre le gaspillage alimentaire, puis leur propose d’installer des zones « Zéro-Gâchis », pour que les produits soient mieux repérés dans les rayons. Les consommateurs peuvent enfin trouver facilement les magasins partenaires sur le site de l’association.
Ces différentes mesures permettront-elles de rendre au doggy bag ses lettres de noblesse ? Si les questions règlementaires concernant d’éventuels problèmes d’hygiène et de traçabilité des aliments rapportés à domicile peuvent freiner la généralisation de la démarche, celle-ci semble en tout cas pratiquée par un nombre croissant de professionnels. En partenariat avec une centaine de restaurateurs, la Ville de Paris a ainsi lancé une initiative originale en la matière fin 2016, préférant au doggy bag l’appellation « box anti-gaspi ». La marque de packagings écologiques « L’Emballage Vert » a quant à elle lancé des boîtes labellisées « Trop bon pour gaspiller », ou TBPG, elles aussi adoptées par plusieurs collectivités publiques. D’autres tentent enfin de « franciser » le concept, en proposant une nouvelle appellation, plus valorisante et gourmande : le « Gourmet-bag ». Le doggy bag à la française est-il en train de naître ?