Relèvement du Seuil de Revente à Perte (SRP) : de quoi parle-t-on ?

Seuil de revente à perte : de quoi s'agit-il ?
Crédits : sergeyryzhov
Le 1er février 2019, le prix de certains produits de grande consommation a augmenté. La raison de cette hausse ? Le relèvement du seuil de revente à perte (SRP), adopté par ordonnance en décembre dernier, dans le cadre de la "loi pour l'équilibre des relations commerciales dans le secteur agricole et une alimentation saine et durable". Lorsque cette dernière n’en était qu’au stade de projet, le mouvement E.Leclerc a commandé une étude afin d’en déterminer les effets sur les producteurs, les industriels, les consommateurs et les distributeurs. En voici quelques extraits.

Le seuil de revente à perte : de quoi s’agit-il ?

Le seuil de revente à perte, ou SRP, est la limite de prix en dessous de laquelle un distributeur ne peut revendre un produit sous peine d’être lourdement sanctionné. Ce seuil est défini légalement par le Code de Commerce comme étant le prix d’achat effectif, c’est-à-dire : « le prix unitaire net figurant sur la facture d’achat, minoré du montant de l’ensemble des autres avantages financiers consentis par le vendeur exprimé en pourcentage du prix unitaire net du produit et majoré des taxes sur le chiffre d’affaires, des taxes spécifiques afférentes à cette revente et du prix du transport. »

La loi actuelle interdit aux distributeurs de revendre en-dessous de ce prix.

Il existe néanmoins des exceptions particulièrement encadrées. Le SRP ne s’applique pas, par exemple, en période de soldes, en fin de saison pour les produits saisonniers, ou en cas de cessation d’activité.

Une étude pour mieux comprendre les effets probables de l’augmentation du SRP 

L’ordonnance dite « SRP » est issue des Etats généraux de l’alimentation qui se sont déroulés l’année dernière. Elle consiste principalement à relever le seuil du SRP pour les seules denrées alimentaires, à titre expérimental, pour une durée de deux ans. Les distributeurs sont ainsi amenés à fixer le prix de vente au détail de chaque produit au moins 10% au-dessus de son prix d’achat effectif. Une mesure censée permettre une meilleure rémunération des agriculteurs face à leurs clients industriels et distributeurs.

Une étude commanditée par le mouvement E.Leclerc, « Evaluation de l’impact du projet de loi issu des Etats Généraux de l’Alimentation », et réalisée sous l’égide de Marie-Laure Allain, directrice de recherche au CNRS et professeur à l’Ecole polytechnique, a évalué les possibles effets de l’augmentation du SRP.

Pour arriver aux estimations issues de l’étude, le cabinet Analysis Group a basé son analyse sur l’intégralité des données relatives à la politique tarifaire du groupe E.Leclerc pour le 3e trimestre 2017.

Quels sont les possibles impacts de l’augmentation du SRP sur la filière agricole ?

Les données produites ont notamment permis aux auteurs « de faire une étude économique plus précise de l’impact de la loi EGA » sur le monde agricole.

Leur conclusion est la suivante : « L’augmentation du SRP ne peut pas, de manière directe et efficace, financer la filière agricole française. En effet, les prix et les marges des fournisseurs et des distributeurs sont le résultat d’un processus de négociation, qui dépend d’un certain nombre de paramètres, en particulier de la demande et du pouvoir de négociation entre fournisseurs et distributeurs » expliquent les auteurs de l’étude. « Pour accroître de manière directe et efficace les marges des fournisseurs et notamment de la filière agricole, il faudrait soit créer de la valeur tout au long de chaîne verticale, soit modifier le rapport de force entre fournisseurs et distributeurs au profit de ces derniers. Or l’augmentation du SRP ne crée pas de valeur, et ne modifie en rien la répartition du pouvoir de négociation entre les différents acteurs impliqués. »

Et sur le pouvoir d’achat des consommateurs ?

Selon les conclusions de cette étude, les consommateurs pourraient également voir leur pouvoir d’achat impacté. Analysis Group a ainsi calculé que l’augmentation du SRP entrainerait une augmentation mécanique de près de 1 % du panier moyen des consommateurs tel qu’il est défini par l’INSEE.

Même si relativement modestes, les effets d’une augmentation des prix des denrées alimentaires de première nécessité auraient « un effet sur l’inflation perçue par les consommateurs plus important encore que sur l’inflation réelle » avance l’étude.

En augmentant le prix de revente de certaines denrées alimentaires, le pouvoir d’achat des consommateurs s’en trouverait impacté. L’étude prévoit également que ce projet de loi pourrait entraîner une baisse du prix d’achat aux agriculteurs sur certains produits, pour compenser une éventuelle diminution des ventes, induite par l’augmentation de leur prix de revente.

L’augmentation du prix de revente pourrait ainsi contraindre les consommateurs à réaliser de nouveaux arbitrages et à ajuster leur demande, soit en privilégiant des produits substituables – qui n’auraient pas été directement affectés par la hausse du SRP, et dont les prix augmenteraient alors – soit en réduisant leur consommation. Une réduction de la consommation qui pourrait peser non seulement sur les consommateurs, mais aussi sur les fournisseurs, les agriculteurs et sur les distributeurs.

Pour plus d’informations sur l’étude, vous pouvez contacter notre service de presse : e.leclerc@agencebabel.com