Recyclage : l’ère d’après le tri sélectif
En 2014, année des derniers chiffres disponibles à ce jour à ce sujet, les Français produisaient 324 millions de tonnes de déchets, desquels 17,5 millions constituaient des matériaux recyclés réutilisés. De fait, en 2015, ce sont 42 millions de Français qui étaient couverts par un programme local de prévention des déchets. Et ce n’est pas fini : en 2030, l’Ademe estime que le taux de recyclage des déchets d’emballages passerait de 42 à 65%.
C’est un fait : il y a maintenant une génération qui est née avec le tri des déchets, le visuel expliquant les différentes poubelles utilisables bien aimanté sur son réfrigérateur. Comme le montre l’Observatoire E. Leclerc des Nouvelles Consommations, on retrouve cet état de fait bien ancré dans les habitudes au moment de consommer : nous ne faisons plus que trier, nous donnons une prime aux produits dont les emballages sont recyclés. Ainsi, l’emballage environnemental est par exemple de plus en plus une priorité pour deux gros tiers des Français (et même plus de 95% des familles dites des Mécènes et des Changeurs).
Ces derniers, consommateurs citoyens par excellence, adaptent aussi leur stratégie pour faire des petites économies : un tiers d’entre eux récupèrent parfois des produits donnés par leur entourage pour les recycler. Et si l’on ajoute à cela les achats d’occasion, le fait de prendre le réflexe systématisé de réparer ou faire réparer leurs objets en panne, ils sont même 60% à « recycler » (contre 38% pour l’ensemble des Français).
De là à faire du goût pour le recyclé une norme de consommation, au-delà du seul tri sélectif ? L’avènement de modèles de conception durable dans le sillon de l’économie circulaire mais aussi la naissance d’initiatives ou de communautés « zéro déchet » pourraient bien pousser le recyclage au-delà des seules sphères de passionnés de déco’ récup’.
Déconsommer : consommer à l’envers ?
« Miracle ! », s’enthousiasmait début 2017 le « média pop » Konbini : les Français seraient entrés dans l’ère de la déconsommation. Pour une analyste interrogée par le média, les moins de 35 ans, encouragés par le « food bashing du lait et de la viande », mais aussi en attente de plus de naturel et donc de moins de sophistication pour les produits d’hygiène et de beauté, seraient les premiers apôtres de cette vague que l’on pourrait rapidement qualifier de mode.
En réalité, notre Observatoire montre que l’ensemble des Français sont concernés : 51% d’entre eux « déconsomment » pour faire des économies, en achetant moins en volume, en renonçant à acheter certains types de produits ou même en ne remplaçant plus certains équipements qui ne fonctionnent plus.
« Inquiétant », comme le titrait BFM Business, s’étonnant du recul des ventes de certains produits en 2016, alors que la conjoncture économique semblait pourtant meilleure ? Révélateur, plutôt, d’une soif d’être « mieux dans sa vie », comme le formule par exemple la chaîne YouTube Le Corps La Maison L’esprit à ses 120 000 abonnés dans ses séances d’expérimentation de consommation minimaliste. Consommer mieux, alors, c’est consommer moins ? 80% des Français (ainsi que 92% des Changeurs), partagent cette opinion ! 69% affirment même consommer « le strict minimum »… La déconsommation semble d’ores et déjà majoritaire !
Ne plus compter sur des systèmes de production qui peuvent paraître trop lointains ou trop opaques, c’est enfin une piste choisie par de plus en plus Français, et qui pourrait bien, elle aussi, devenir majoritaire. Dans la pratique, cette soif d’indépendance se retrouve dès lors dans la mouvance DIY (pour « do-it-yourself ») et ses nombreuses communautés en ligne (dans le bricolage, la décoration, les vêtements, les accessoires, les produits de beauté ou d’hygiène, les meubles, etc.). Les potagers à domicile, en parallèle, fleurissent.
58% des Français se retrouvent dans cette idée d’autosuffisance : c’est même le cas de jusqu’à 88% pour la famille des Changeurs. Un exemple ? L’autoconsommation d’électricité, atteinte en installant chez soi un système de production, a fortiori photovoltaïque, touche déjà 5 000 foyers français, et la législation française vient d’évoluer pour favoriser à la fois l’autoconsommation des particuliers et celle « collective », à l’échelle de bâtiments ou d’îlots d’immeubles.
Bientôt une nouvelle norme de consommation ? Les signes, en tout cas, se multiplient : une ville aussi grande qu’Albi fait déjà de l’autosuffisance alimentaire un cap de politique publique à l’horizon 2020 !